Ouvrages fondateurs de la confiance
« La confiance : Un mécanisme de réduction de la complexité sociale »
Auteur : Niklas Luhmann (Préface : Lukas Sosoe, Traduction : Stéphane Bouchard)
Date de parution : 2006
Editeur : Economica
"La confiance au sens le plus large du terme, c'est-à-dire le fait de se fier à ses propres attentes, constitue une donnée élémentaire de la vie en société. Certes, l'homme a, en de nombreuses situations, le choix d'accorder ou non sa confiance à divers égards. Mais, s'il ne faisait pas confiance de manière courante, il n'arriverait même pas à quitter son lit le matin. Une angoisse indéterminée, une répulsion paralysante l'assailliraient. Il ne serait même pas en mesure de formuler une méfiance définie et d'en faire le principe à la base de mesures défensives, car cela serait présupposer qu'il accorde sa confiance à d'autres égards. Tout serait alors possible. Nul ne peut supporter une telle confrontation immédiate avec la plus extrême complexité du monde." Niklas Luhmann .
« La société de confiance : Essais sur les origines du développement »
Auteur : Alain Peyrefitte
Date de parution : 2005
Editeur : Odile Jacob
Qu'est-ce qui permet la modernité, le progrès, la croissance ? Depuis Adam Smith et Karl Marx jusqu'à Max Weber et Fernand Braudel, on n'a cessé de s'interroger sur les causes de la " richesse des nations " ou de leur pauvreté. La plupart des penseurs ont privilégié les explications matérielles. Et si les mentalités et les comportements constituaient le principal facteur du développement - ou du sous-développement ? Pour évaluer la fécondité de cette hypothèse, Alain Peyrefitte propose de revisiter l'histoire de la chrétienté occidentale et montre que le développement en Europe trouve sa source dans ce qu'il appelle un " éthos de confiance " qui a bousculé des tabous traditionnels et favorisé l'innovation, la mobilité, la compétition, l'initiative rationnelle et responsable. " Alain Peyrefitte a mis sa passion et son talent pour essayer de nous convaincre. Il a réussi. " Le Monde.
Le livre d'Alain Peyrefitte, La société de confiance approfondit les idées déjà esquissées en 1976 (dans Le Mal français) sur le tiers facteur immatériel à la source de tout processus cumulatif de développement. Si l'on se situe dans le schéma que Rostow a vulgarisé dans Les étapes de la croissance économique, il existe entre le stade de la société traditionnelle et celui du décollage une phase intermédiaire au cours de laquelle se rassemblent les conditions préalables au démarrage. Pour Alain Peyrefitte, la condition essentielle ne se trouve pas dans les deux facteurs, capital et travail, mais dans l'évolution des mentalités qui, loin d'en découler, en est à l'origine. Le ressort du développement, c'est la constitution d'une société de confiance, confiance que l'État accorde à l'initiative individuelle, et surtout confiance que les individus accordent à l'État, se reconnaissent entre eux et se font à eux-mêmes. Contrairement à la société de défiance gagnant-perdant, "société propre à la lutte des classes (...), la société de confiance est une société en expansion gagnant-gagnant, société de solidarité, de projet commun, d'ouverture, d'échange, de communication".
C'est l'établissement d'un tel état d'esprit général qui constitue le tiers facteur immatériel indispensable au décollage. L'essentiel pour l'auteur est de se dégager de tout déterminisme économique pour mettre en évidence les mécanismes mentaux, freins ou accélérateurs du développement, qui sont inégalement présents selon les lieux ou selon les moments. A ce titre, plusieurs questions sont posées dans cet ouvrage : comment faire passer la France actuelle de la société de défiance à celle de la société de confiance ? Comment enclencher le déblocage des mentalités nécessaire aux adaptations que l'ouverture des frontières rend urgentes ? D'un autre côté, comment accélérer l'évolution des mentalités dans les pays du Sud encore victimes du sous-développement ?
« La société de défiance : Comment le modèle social français s'autodétruit ? »
Auteurs : Yann Algan et Pierre Cahuc
Date de parution : 2007
Editeur : Rue d'Ulm (Collection CEPREMAT)
Depuis plus de vingt ans, des enquêtes menées dans tous les pays développés montrent que les français, plus souvent que les habitants des autres pays se méfient de leurs concitoyens, des pouvoirs publics et du marché. Cette défiance va de pair avec un incivisme plus fréquent dans les domaines essentiels au fonctionnement de l'économie et de l'Etat-providence (Yann Algan, professeur d'économie).Les auteurs montrent que la France est caractérisée par une défiance particulièrement marquée, qui entrave la croissance économique et la prospérité de tous. Cela se manifeste par une tendance plus grande à la fraude par exemple. Cette défiance est le fruit de l'étatisme et du corporatisme issus de la défaite de 1940 et de Vichy selon les auteurs. D'un point de vue libéral, on peut noter que cela est une vérification empirique de la fameuse citation de Frédéric Bastiat : « L'État, c'est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde. » Profitant du maquis d'aides, on essaie de tirer le plus possible de l'État; partant, pourquoi s'attendre à autre chose chez autrui et lui faire confiance ?
« La fabrique de la défiance »
Auteurs : Yann Algan, Pierre Cahuc, André Zylberberg
Date de parution : Février 2012
Editeur : Albin Michel
Hiérarchie, inégalités et défiance : telle est la véritable devise de la société française ! Hiérarchisée à l’excès, élitiste, conflictuelle, cette organisation de notre société mine les relations sociales mais aussi la confiance en l’avenir et la croissance. Diffusée à l’ensemble du corps social (entreprises, salariés, partenaires sociaux, Etat…), cette logique empêche pour l’instant la France de sortir de l’engrenage du déclin annoncé. Depuis 10 ans, ses effets pervers sont accentués par le manque de transparence du gouvernement, de capacité intégratrice du système scolaire et la mauvaise qualité des relations sociales. Autant d’entraves à l’économie française. Pourtant, le déclin n’est pas une fatalité : les nombreuses réformes menées à l’étranger offrent des pistes pour sortir de l’ornière.
La défiance est au cœur du pessimisme français. Elle détruit inexorablement notre goût de coopérer et de vivre ensemble. Elle n'est pourtant pas un héritage culturel immuable. Au terme d'une analyse iconoclaste Yann Algan, Pierre Cahuc et André Zylberberg, trois économistes réputés, montrent comment la défiance résulte d'un cercle vicieux où le fonctionnement hiérarchique et élitiste de l'école nourrit celui des entreprises et de l'Etat. S'y ajoute une logique corporatiste, où chaque profession essaie de tirer au mieux parti de l'argent public, le plus souvent... au détriment des autres. En amorçant des réformes vite abandonnées, en multipliant les faveurs fiscales ciblées, en laissant proliférer les conflits d'intérêts, le pouvoir a au contraire, depuis une décennie, aggravé la crise. Sommes-nous pour autant condamnés à cet engrenage paralysant ? Un Etat libéré des logiques clientélistes, une école moins obsédée par les classements, une renonciation aux statuts de toutes sortes sont autant de moyens de sortir du déclin qui nous menace. En vérité, le changement ne passe pas forcément par l'ambition de tout changer tout de suite.
« Secret et sociétés secrètes »
Auteur : Georg Simmel
Date de parution : 1991
Editeur : Circé
Le propos premier de Simmel est de rappeler que si toute relation entre les hommes réclament un certain savoir sur autrui , ce savoir ne doit pas être parfait pour que l'interaction fonctionne. Le non-savoir, l'ambiguïté, le flou, le mensonge et le secret sont des éléments indispensables au fonctionnement de l'interaction et sont sociologiquement positifs (même s'ils peuvent être négatifs d'un point de vue moral). Il y a là une approche à retenir et à mettre en opposition avec les théories de la transparence (qu’elles soient philosophiques, "communicationnelles" ou économiques). Il aborde d'abord le problème des interactions en général et met en évidence cinq concepts indispensables à l'établissement des interactions sociales : la vérité et l'erreur, le mensonge, le secret, la confiance.
Dans les sociétés modernes les individus s'engagent de plus en plus souvent dans des relations où on n'engage qu'une part de soi-même (relation commerciale par exemple). La connaissance d'autrui n'est donc que partielle et la relation, pour s'établir, doit reposer sur la confiance. La confiance est alors un intermédiaire entre savoir et non savoir. Il est intéressant alors de noter que dans les sociétés modernes le comportement futur d'un individu est relativement garanti par les institutions (le cas le plus simple est celui du client dont la solvabilité est garantie par la banque); dans ce cas, si les conditions extérieures peuvent être une base de la confiance, alors il n'est plus besoin de connaitre les qualités personnelles de l'individu.
« La confiance et la puissance »
Auteur : Francis Fukuyama
Date de parution : 1997
Editeur : Plon
Où trouver la clef de la prospérité pour le prochain siècle ? Les uns célèbrent l'avènement du "tout libéral", d'autres comptent sur les bienfaits d'un capitalisme tempéré ! Tous négligent la dimension culturelle : réussite économique et solidité politique sont conditionnées par le fonctionnement harmonieux de la société civile. Pour l'avoir compris, Américains, Allemands, et Japonais ont créé des sociétés à confiance forte. En revanche, Français et Italiens, mais aussi Chinois et Coréens en sont encore au temps de la suspicion et d'un capitalisme qui semble fragile à l'heure de la globalisation des marchés.
Au terme d'une analyse qui mobilise autant Tocqueville que les entrepreneurs de Canton ou les syndicalistes de Turin, Fukuyama propose de redonner du sens et du contenu aux rapports entre individus. Autrement dit, ce qui est bon pour la société est bon pour le capitalisme, mais un capitalisme qui aurait compris que le " capital social " est aussi indispensable que l'investissement.
Autre ouvrage sur la confiance
« Le contrat de défiance »
Auteur : Michela Marzano
Date de parution : 2010
Editeur : Grasset
Sans confiance entre les individus, c’est toute notre société qui s’écroule. La peur, la déraison, la faillite, la guerre, la paranoïa menacent. Pourtant : la judiciarisation des rapports contractuels, le désir de contrôle, la difficulté d'accepter notre part humaine de fragilité, sans laquelle la confiance n’existe pas, engendrent une société ou de la défiance.
L’essai magistral de Michela Marzano offre une double perspective historique et philosophique : de la banqueroute de Law (1720) à la crise du prêt interbancaire (2007-2008), de l’égoïsme libéral au doute systématique des théories du complot, du don de soi dans l’amour à la multiplication des conflits juridiques dans la sphère privée (sait-on que 70 % des contentieux au TGI sont familiaux ?), de la crainte de tout perdre à l’éloge de la dépendance, Michela Marzano construit et déconstruit notre rapport à la confiance. Le pilier de notre civilisation.
Extrait de l'introduction :
Dans une célèbre histoire juive, un père demande à son fils de sauter par la fenêtre. Au départ, l'enfant, effrayé, hésite. « Tu n'as pas confiance en ton propre père ? », dit ce dernier pour rassurer son fils. Celui-ci se décide enfin à sauter. En tombant par terre, il se blesse. « Désormais tu le sais, dit le père devant l'enfant en larmes. Tu ne dois avoir confiance en personne. Même pas en ton propre père ! » Cette histoire bizarre pose une question fondatrice. Si je peux être trahi même par mon propre père, comment puis-je tout simplement avoir confiance en quelqu'un ? Si je ne peux avoir confiance en personne, comment puisse imaginer qu'on me fasse aussi confiance ? Et il faut aller plus loin. Si nous ne pouvons pas compter les uns sur les autres, comment bâtir une société digne de ce nom ? La confiance est le ciment de nos sociétés. Pourtant, si tout le monde l'évoque, rares sont ceux qui en saisissent réellement la nature. Chacun de nous voudrait vivre dans un monde où les gens sont « dignes » de confiance. Mais encore faudrait-il savoir ce que cela signifie réellement. Aujourd'hui, la confiance est partout. Elle est même prétexte à slogans publicitaires. Les entreprises comme les hommes politiques parlent du « contrat de confiance » qu'ils voudraient passer avec leurs consommateurs ou leurs électeurs.
Durant la crise des subprimes, les économistes n'ont cessé d'évoquer la confiance. Pourtant, qui s'est jamais soucié de sa nature profonde ? Or, de la confiance dans une banque à la confiance dans la politique, en passant par la confiance en ses parents, ses amis ou ses partenaires, chacun mesure qu'il y a bien des nuances, pour ne pas dire des différences. Peut-on comparer le crédit qu'on accorde aux hommes de pouvoir avec la confiance que l'on fait à son conjoint ? Parle-t-on exactement de la même chose ? Et si on ne parlait autant de la confiance que parce que nous vivons dans un monde où les gens sont de plus en plus méfiants ?
Auteur : Niklas Luhmann (Préface : Lukas Sosoe, Traduction : Stéphane Bouchard)
Date de parution : 2006
Editeur : Economica
"La confiance au sens le plus large du terme, c'est-à-dire le fait de se fier à ses propres attentes, constitue une donnée élémentaire de la vie en société. Certes, l'homme a, en de nombreuses situations, le choix d'accorder ou non sa confiance à divers égards. Mais, s'il ne faisait pas confiance de manière courante, il n'arriverait même pas à quitter son lit le matin. Une angoisse indéterminée, une répulsion paralysante l'assailliraient. Il ne serait même pas en mesure de formuler une méfiance définie et d'en faire le principe à la base de mesures défensives, car cela serait présupposer qu'il accorde sa confiance à d'autres égards. Tout serait alors possible. Nul ne peut supporter une telle confrontation immédiate avec la plus extrême complexité du monde." Niklas Luhmann .
« La société de confiance : Essais sur les origines du développement »
Auteur : Alain Peyrefitte
Date de parution : 2005
Editeur : Odile Jacob
Qu'est-ce qui permet la modernité, le progrès, la croissance ? Depuis Adam Smith et Karl Marx jusqu'à Max Weber et Fernand Braudel, on n'a cessé de s'interroger sur les causes de la " richesse des nations " ou de leur pauvreté. La plupart des penseurs ont privilégié les explications matérielles. Et si les mentalités et les comportements constituaient le principal facteur du développement - ou du sous-développement ? Pour évaluer la fécondité de cette hypothèse, Alain Peyrefitte propose de revisiter l'histoire de la chrétienté occidentale et montre que le développement en Europe trouve sa source dans ce qu'il appelle un " éthos de confiance " qui a bousculé des tabous traditionnels et favorisé l'innovation, la mobilité, la compétition, l'initiative rationnelle et responsable. " Alain Peyrefitte a mis sa passion et son talent pour essayer de nous convaincre. Il a réussi. " Le Monde.
Le livre d'Alain Peyrefitte, La société de confiance approfondit les idées déjà esquissées en 1976 (dans Le Mal français) sur le tiers facteur immatériel à la source de tout processus cumulatif de développement. Si l'on se situe dans le schéma que Rostow a vulgarisé dans Les étapes de la croissance économique, il existe entre le stade de la société traditionnelle et celui du décollage une phase intermédiaire au cours de laquelle se rassemblent les conditions préalables au démarrage. Pour Alain Peyrefitte, la condition essentielle ne se trouve pas dans les deux facteurs, capital et travail, mais dans l'évolution des mentalités qui, loin d'en découler, en est à l'origine. Le ressort du développement, c'est la constitution d'une société de confiance, confiance que l'État accorde à l'initiative individuelle, et surtout confiance que les individus accordent à l'État, se reconnaissent entre eux et se font à eux-mêmes. Contrairement à la société de défiance gagnant-perdant, "société propre à la lutte des classes (...), la société de confiance est une société en expansion gagnant-gagnant, société de solidarité, de projet commun, d'ouverture, d'échange, de communication".
C'est l'établissement d'un tel état d'esprit général qui constitue le tiers facteur immatériel indispensable au décollage. L'essentiel pour l'auteur est de se dégager de tout déterminisme économique pour mettre en évidence les mécanismes mentaux, freins ou accélérateurs du développement, qui sont inégalement présents selon les lieux ou selon les moments. A ce titre, plusieurs questions sont posées dans cet ouvrage : comment faire passer la France actuelle de la société de défiance à celle de la société de confiance ? Comment enclencher le déblocage des mentalités nécessaire aux adaptations que l'ouverture des frontières rend urgentes ? D'un autre côté, comment accélérer l'évolution des mentalités dans les pays du Sud encore victimes du sous-développement ?
« La société de défiance : Comment le modèle social français s'autodétruit ? »
Auteurs : Yann Algan et Pierre Cahuc
Date de parution : 2007
Editeur : Rue d'Ulm (Collection CEPREMAT)
Depuis plus de vingt ans, des enquêtes menées dans tous les pays développés montrent que les français, plus souvent que les habitants des autres pays se méfient de leurs concitoyens, des pouvoirs publics et du marché. Cette défiance va de pair avec un incivisme plus fréquent dans les domaines essentiels au fonctionnement de l'économie et de l'Etat-providence (Yann Algan, professeur d'économie).Les auteurs montrent que la France est caractérisée par une défiance particulièrement marquée, qui entrave la croissance économique et la prospérité de tous. Cela se manifeste par une tendance plus grande à la fraude par exemple. Cette défiance est le fruit de l'étatisme et du corporatisme issus de la défaite de 1940 et de Vichy selon les auteurs. D'un point de vue libéral, on peut noter que cela est une vérification empirique de la fameuse citation de Frédéric Bastiat : « L'État, c'est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde. » Profitant du maquis d'aides, on essaie de tirer le plus possible de l'État; partant, pourquoi s'attendre à autre chose chez autrui et lui faire confiance ?
« La fabrique de la défiance »
Auteurs : Yann Algan, Pierre Cahuc, André Zylberberg
Date de parution : Février 2012
Editeur : Albin Michel
Hiérarchie, inégalités et défiance : telle est la véritable devise de la société française ! Hiérarchisée à l’excès, élitiste, conflictuelle, cette organisation de notre société mine les relations sociales mais aussi la confiance en l’avenir et la croissance. Diffusée à l’ensemble du corps social (entreprises, salariés, partenaires sociaux, Etat…), cette logique empêche pour l’instant la France de sortir de l’engrenage du déclin annoncé. Depuis 10 ans, ses effets pervers sont accentués par le manque de transparence du gouvernement, de capacité intégratrice du système scolaire et la mauvaise qualité des relations sociales. Autant d’entraves à l’économie française. Pourtant, le déclin n’est pas une fatalité : les nombreuses réformes menées à l’étranger offrent des pistes pour sortir de l’ornière.
La défiance est au cœur du pessimisme français. Elle détruit inexorablement notre goût de coopérer et de vivre ensemble. Elle n'est pourtant pas un héritage culturel immuable. Au terme d'une analyse iconoclaste Yann Algan, Pierre Cahuc et André Zylberberg, trois économistes réputés, montrent comment la défiance résulte d'un cercle vicieux où le fonctionnement hiérarchique et élitiste de l'école nourrit celui des entreprises et de l'Etat. S'y ajoute une logique corporatiste, où chaque profession essaie de tirer au mieux parti de l'argent public, le plus souvent... au détriment des autres. En amorçant des réformes vite abandonnées, en multipliant les faveurs fiscales ciblées, en laissant proliférer les conflits d'intérêts, le pouvoir a au contraire, depuis une décennie, aggravé la crise. Sommes-nous pour autant condamnés à cet engrenage paralysant ? Un Etat libéré des logiques clientélistes, une école moins obsédée par les classements, une renonciation aux statuts de toutes sortes sont autant de moyens de sortir du déclin qui nous menace. En vérité, le changement ne passe pas forcément par l'ambition de tout changer tout de suite.
« Secret et sociétés secrètes »
Auteur : Georg Simmel
Date de parution : 1991
Editeur : Circé
Le propos premier de Simmel est de rappeler que si toute relation entre les hommes réclament un certain savoir sur autrui , ce savoir ne doit pas être parfait pour que l'interaction fonctionne. Le non-savoir, l'ambiguïté, le flou, le mensonge et le secret sont des éléments indispensables au fonctionnement de l'interaction et sont sociologiquement positifs (même s'ils peuvent être négatifs d'un point de vue moral). Il y a là une approche à retenir et à mettre en opposition avec les théories de la transparence (qu’elles soient philosophiques, "communicationnelles" ou économiques). Il aborde d'abord le problème des interactions en général et met en évidence cinq concepts indispensables à l'établissement des interactions sociales : la vérité et l'erreur, le mensonge, le secret, la confiance.
Dans les sociétés modernes les individus s'engagent de plus en plus souvent dans des relations où on n'engage qu'une part de soi-même (relation commerciale par exemple). La connaissance d'autrui n'est donc que partielle et la relation, pour s'établir, doit reposer sur la confiance. La confiance est alors un intermédiaire entre savoir et non savoir. Il est intéressant alors de noter que dans les sociétés modernes le comportement futur d'un individu est relativement garanti par les institutions (le cas le plus simple est celui du client dont la solvabilité est garantie par la banque); dans ce cas, si les conditions extérieures peuvent être une base de la confiance, alors il n'est plus besoin de connaitre les qualités personnelles de l'individu.
« La confiance et la puissance »
Auteur : Francis Fukuyama
Date de parution : 1997
Editeur : Plon
Où trouver la clef de la prospérité pour le prochain siècle ? Les uns célèbrent l'avènement du "tout libéral", d'autres comptent sur les bienfaits d'un capitalisme tempéré ! Tous négligent la dimension culturelle : réussite économique et solidité politique sont conditionnées par le fonctionnement harmonieux de la société civile. Pour l'avoir compris, Américains, Allemands, et Japonais ont créé des sociétés à confiance forte. En revanche, Français et Italiens, mais aussi Chinois et Coréens en sont encore au temps de la suspicion et d'un capitalisme qui semble fragile à l'heure de la globalisation des marchés.
Au terme d'une analyse qui mobilise autant Tocqueville que les entrepreneurs de Canton ou les syndicalistes de Turin, Fukuyama propose de redonner du sens et du contenu aux rapports entre individus. Autrement dit, ce qui est bon pour la société est bon pour le capitalisme, mais un capitalisme qui aurait compris que le " capital social " est aussi indispensable que l'investissement.
Autre ouvrage sur la confiance
« Le contrat de défiance »
Auteur : Michela Marzano
Date de parution : 2010
Editeur : Grasset
Sans confiance entre les individus, c’est toute notre société qui s’écroule. La peur, la déraison, la faillite, la guerre, la paranoïa menacent. Pourtant : la judiciarisation des rapports contractuels, le désir de contrôle, la difficulté d'accepter notre part humaine de fragilité, sans laquelle la confiance n’existe pas, engendrent une société ou de la défiance.
L’essai magistral de Michela Marzano offre une double perspective historique et philosophique : de la banqueroute de Law (1720) à la crise du prêt interbancaire (2007-2008), de l’égoïsme libéral au doute systématique des théories du complot, du don de soi dans l’amour à la multiplication des conflits juridiques dans la sphère privée (sait-on que 70 % des contentieux au TGI sont familiaux ?), de la crainte de tout perdre à l’éloge de la dépendance, Michela Marzano construit et déconstruit notre rapport à la confiance. Le pilier de notre civilisation.
Extrait de l'introduction :
Dans une célèbre histoire juive, un père demande à son fils de sauter par la fenêtre. Au départ, l'enfant, effrayé, hésite. « Tu n'as pas confiance en ton propre père ? », dit ce dernier pour rassurer son fils. Celui-ci se décide enfin à sauter. En tombant par terre, il se blesse. « Désormais tu le sais, dit le père devant l'enfant en larmes. Tu ne dois avoir confiance en personne. Même pas en ton propre père ! » Cette histoire bizarre pose une question fondatrice. Si je peux être trahi même par mon propre père, comment puis-je tout simplement avoir confiance en quelqu'un ? Si je ne peux avoir confiance en personne, comment puisse imaginer qu'on me fasse aussi confiance ? Et il faut aller plus loin. Si nous ne pouvons pas compter les uns sur les autres, comment bâtir une société digne de ce nom ? La confiance est le ciment de nos sociétés. Pourtant, si tout le monde l'évoque, rares sont ceux qui en saisissent réellement la nature. Chacun de nous voudrait vivre dans un monde où les gens sont « dignes » de confiance. Mais encore faudrait-il savoir ce que cela signifie réellement. Aujourd'hui, la confiance est partout. Elle est même prétexte à slogans publicitaires. Les entreprises comme les hommes politiques parlent du « contrat de confiance » qu'ils voudraient passer avec leurs consommateurs ou leurs électeurs.
Durant la crise des subprimes, les économistes n'ont cessé d'évoquer la confiance. Pourtant, qui s'est jamais soucié de sa nature profonde ? Or, de la confiance dans une banque à la confiance dans la politique, en passant par la confiance en ses parents, ses amis ou ses partenaires, chacun mesure qu'il y a bien des nuances, pour ne pas dire des différences. Peut-on comparer le crédit qu'on accorde aux hommes de pouvoir avec la confiance que l'on fait à son conjoint ? Parle-t-on exactement de la même chose ? Et si on ne parlait autant de la confiance que parce que nous vivons dans un monde où les gens sont de plus en plus méfiants ?
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