Questions sur la confiance : Laurence HézardAncien Directeur Général de GrDF, membre du Comité d’Orientation et Scientifique de TMI, membre du Conseil économique, social et environnemental.
Diplômée de Lettres classiques à la Sorbonne, Laurence Hézard ne semblait pas a priori destinée à une carrière de dirigeante dans les secteurs nucléaire et gazier. Elle a pourtant su gagner la confiance et s’imposer dans ces milieux scientifiques et masculins. Directeur de la Communication et du Cabinet du directeur du Parc nucléaire d’EDF, Laurence Hézard a ensuite été directeur de Groupement de Centres d’EDF GDF Service puis directeur général de GrDF.
Laurence Hézard a publié L’énergie au cœur, entretiens avec Vianney Aubert, Choiseul Éditions, 2011. Elle est aussi coauteur de Dirigeants : se réapproprier le désir de penser et la volonté d’agir, Chronique Sociale, 2013.
Laurence Hézard a publié L’énergie au cœur, entretiens avec Vianney Aubert, Choiseul Éditions, 2011. Elle est aussi coauteur de Dirigeants : se réapproprier le désir de penser et la volonté d’agir, Chronique Sociale, 2013.
« Ce qui relie les personnes, ce qui nourrit le lien »
Trust Management Institute : Comment est né ce livre collectif signé Le Club des Idées : Dirigeants : se réapproprier le désir de penser et la volonté d’agir ?
Laurence Hézard : La démarche a commencé en 2007. Au départ, nous n’avions pas du tout l’objectif de publier un ouvrage. Un de mes anciens collègues du nucléaire à EDF m’a contactée parce qu’il affrontait une situation difficile dans une centrale nucléaire, le suicide d’un cadre, suivi d’autres. Il savait que j’avais eu à gérer une situation similaire dans une de mes responsabilités précédentes. Et il avait besoin d’échanger avec moi parce que c’est une situation grave, qui touche à l’humain, qui remet en question un certain nombre de pratiques, même si on s’accorde à dire qu’un suicide est la conséquence dramatique de multiples paramètres. Nous avons échangé et finalement, nous avons jugé la démarche intéressante, puisqu’on n’a pas d’endroit dans nos entreprises pour pouvoir, d’une façon simple, parler de ces situations-là, sans avoir peur de jugement hâtifs et en ayant le temps d’essayer de comprendre.
C’est comme ça que nous avons créé Le Club des Idées. Il s’est enrichi de plusieurs personnes, certaines proches, d’autres venues d’autres horizons. Nous étions donc une petite dizaine à débattre de thèmes tels que la financiarisation, le choc des cultures entre le monde financier et le monde industriel, les logiques de long terme et de court terme, comment gérer un risque, est-ce qu’un parcours personnel influe sur le parcours professionnel, etc. J’avais demandé à une personne qui travaillait pour moi dans l’accompagnement des dirigeants à l’époque de GrDF, de se joindre à nous. Elle écoutait, prenait des notes, synthétisait. Et elle nous a suggéré d’en faire un ouvrage, pensant que la matière était intéressante. Nous nous sommes dits : pourquoi pas ? Finalement, elle a repris nos échanges pour en faire un texte, on a retravaillé dessus et nous avons trouvé un éditeur, Chronique Sociale..
TMI : Un des chapitres s’intitule « La confiance », il analyse les qualités managériales sur lesquelles repose la confiance dans l’entreprise : expertise, qualités personnelles, leadership, capacité stratégique, etc. Qu’évoque pour vous la confiance ?
L.H. : C’est ce qui relie les personnes, particulièrement dans une entreprise, c’est ce qui nourrit le lien entre les salariés, entre les salariés et leur management, ce qui relie le salarié à l’entreprise. J’ai eu dans ma carrière, que ce soit dans le nucléaire et ensuite dans le secteur du gaz, à retisser ce « contrat invisible » comme le dit Stratorg afin de recréer des bases, des points de repère connus, partagés, et à partir desquels on construit un mode de fonctionnement et un projet.
La confiance, c’est cette démarche qui va consister à réassurer qu’on est bien sur les mêmes valeurs, sur les mêmes points de repère et de compréhension et qui vont permettre à chacun de se sentir à l’aise, en confiance dans son travail, savoir à quoi il sert, quelle est la visibilité qu’il a dans l’avenir de son activité, quelles sont les difficultés aussi. Et comment il va fonctionner dans le collectif de l’entreprise et dans la relation avec son management.
TMI : Quel a été le rôle de la confiance dans votre parcours ?
TMI : Quel est, dans le domaine de la confiance, le défi le plus important que vous ayez eu à affronter ?
L.H. : Quand je suis arrivée dans le nucléaire, j’étais la seule à avoir ce profil littéraire dans une équipe de direction au niveau national. J’ai dû me légitimer dans ce milieu, avec cette équipe d’hommes et avec, à l’époque, des comportements dont on peut dire qu’ils étaient de l’ordre du bizutage. Cela, je m’en souviendrai longtemps, ça m’a vraiment frappée. Mais une fois que j’ai pu démontrer mes compétences, tisser des liens, me faire accepter, la confiance s’est instaurée, ça a très bien fonctionné. Le second challenge, ça a été en tant que dirigeant, lorsque je suis entrée dans le secteur du gaz. Il m’a fallu travailler sur la gestion du risque industriel et retisser, rétablir toute la relation de confiance à l’intérieur des équipes d’exploitants, pour sortir d’une longue période qui avait été basée sur la productivité au détriment de la politique industrielle et de tout ce qui concernait la sécurité. J’ai dû montrer que je m’engageais avec eux pour rebâtir les fondamentaux de leur métier, redonner la priorité à la sécurité, au renouvellement des compétences, etc. Donc il y avait des gages à donner pour qu’ils me croient et qu’ils acceptent de partir avec moi dans cette démarche de sécurité. Il s’agissait de sortir d’une période où ils n’avaient plus du tout confiance dans l’entreprise.
TMI : Comment analysez-vous le déficit de confiance au sein de la société française ?
TMI : Au-delà des politiques, d’autres instances sont-elles visées ? Syndicats, grandes entreprises, grands patrons…
C’est facile d’expliquer que tout cela c’est à cause de l’autre, mais c’est aussi ce qui ne permettra en aucun cas de s’en sortir.
Parce que je crois qu’on ne s’en sortira qu’en instaurant la coopération et la transversalité - que ce soit au sein d’une entreprise ou bien dans le pays -, en suscitant la mobilisation sur des objets positifs, pour créer de la valeur, de l’emploi, pour redonner de la confiance, plutôt qu’en séparant et en montant les uns contre les autres.
TMI : Que pourriez-vous suggérer au président de la République ?
TMI : Une crainte, un espoir pour l’avenir ?
TMI : Qu’est-ce qui vous a poussée à rejoindre TMI ?
L.H. : D’abord, la possibilité de travailler sur ces sujets de la confiance, de l’attitude des managers, des dirigeants. Nous venons de milieux différents, nous avons des responsabilités différentes, et donc travailler sur ce sujet-là me passionne. Il n’y a pas beaucoup d’endroits où on peut le faire. Parce que moi qui suis considérée comme ayant une formation issue des « sciences molles », par opposition aux « sciences dures », je trouve que l’énergie d’un pays ou d’un groupe humain vient justement de ces complémentarités et justement, de cette prise de conscience que l’humain est le moteur principal. J’entendais récemment parler du développement de plateformes virtuelles pour les étudiants. Les facs ne seront plus ce qu’elles étaient, très bien. Mais personne ne parle de l’importance du creuset social que constitue une faculté. D’un côté une formidable possibilité offerte par les nouvelles technologies, de l’autre cette question : comment l’utiliser pour donner du sens à l’humain et à la relation entre les humains ? Pour moi, TMI c’est cette possibilité-là.
TMI : Comment comptez-vous articuler votre activité à TMI et votre action au Club des Idées ?
L.H. : Je ne sais pas encore comment le Club des Idées va évoluer. Nous sommes à un moment charnière. Mon intention, et je vais en parler prochainement avec mes collègues, ce serait de susciter l’éclosion et la mise en place de Clubs des Idées pilotés par des jeunes. D’autre part, nous allons voir comment on peut créer et développer, comme cela se fait de plus en plus, un réseau virtuel qui relierait le Club des Idées, TMI et d’autres acteurs. Nous avons déjà mis en place un blog : ledésirdepenser.com… Ce n’est qu’une première étape !
Consultez le blog Le désir de penser.
Trust Management Institute : Comment est né ce livre collectif signé Le Club des Idées : Dirigeants : se réapproprier le désir de penser et la volonté d’agir ?
Laurence Hézard : La démarche a commencé en 2007. Au départ, nous n’avions pas du tout l’objectif de publier un ouvrage. Un de mes anciens collègues du nucléaire à EDF m’a contactée parce qu’il affrontait une situation difficile dans une centrale nucléaire, le suicide d’un cadre, suivi d’autres. Il savait que j’avais eu à gérer une situation similaire dans une de mes responsabilités précédentes. Et il avait besoin d’échanger avec moi parce que c’est une situation grave, qui touche à l’humain, qui remet en question un certain nombre de pratiques, même si on s’accorde à dire qu’un suicide est la conséquence dramatique de multiples paramètres. Nous avons échangé et finalement, nous avons jugé la démarche intéressante, puisqu’on n’a pas d’endroit dans nos entreprises pour pouvoir, d’une façon simple, parler de ces situations-là, sans avoir peur de jugement hâtifs et en ayant le temps d’essayer de comprendre.
C’est comme ça que nous avons créé Le Club des Idées. Il s’est enrichi de plusieurs personnes, certaines proches, d’autres venues d’autres horizons. Nous étions donc une petite dizaine à débattre de thèmes tels que la financiarisation, le choc des cultures entre le monde financier et le monde industriel, les logiques de long terme et de court terme, comment gérer un risque, est-ce qu’un parcours personnel influe sur le parcours professionnel, etc. J’avais demandé à une personne qui travaillait pour moi dans l’accompagnement des dirigeants à l’époque de GrDF, de se joindre à nous. Elle écoutait, prenait des notes, synthétisait. Et elle nous a suggéré d’en faire un ouvrage, pensant que la matière était intéressante. Nous nous sommes dits : pourquoi pas ? Finalement, elle a repris nos échanges pour en faire un texte, on a retravaillé dessus et nous avons trouvé un éditeur, Chronique Sociale..
TMI : Un des chapitres s’intitule « La confiance », il analyse les qualités managériales sur lesquelles repose la confiance dans l’entreprise : expertise, qualités personnelles, leadership, capacité stratégique, etc. Qu’évoque pour vous la confiance ?
L.H. : C’est ce qui relie les personnes, particulièrement dans une entreprise, c’est ce qui nourrit le lien entre les salariés, entre les salariés et leur management, ce qui relie le salarié à l’entreprise. J’ai eu dans ma carrière, que ce soit dans le nucléaire et ensuite dans le secteur du gaz, à retisser ce « contrat invisible » comme le dit Stratorg afin de recréer des bases, des points de repère connus, partagés, et à partir desquels on construit un mode de fonctionnement et un projet.
La confiance, c’est cette démarche qui va consister à réassurer qu’on est bien sur les mêmes valeurs, sur les mêmes points de repère et de compréhension et qui vont permettre à chacun de se sentir à l’aise, en confiance dans son travail, savoir à quoi il sert, quelle est la visibilité qu’il a dans l’avenir de son activité, quelles sont les difficultés aussi. Et comment il va fonctionner dans le collectif de l’entreprise et dans la relation avec son management.
TMI : Quel a été le rôle de la confiance dans votre parcours ?
« Il a fallu de la confiance réciproque. »
L.H. : Il a été important car j’ai un profil un peu atypique. Je suis issue d’une formation littéraire, j’ai passé beaucoup de temps à faire du latin, du grec, du sanscrit… Je n’ai donc rien à voir avec le monde des ingénieurs. Quand je suis entrée dans ce monde-là, j’ai découvert que c’était un monde humain passionnant. Mais surtout, ce qui m’a épatée, c’est l’écoute d’un milieu très technique et très masculin, il faut le dire. Écoute par rapport à ma façon de poser des questions, les dirigeants considérant que ma différence pouvait être un levier et un moteur qui les aide à faire évoluer la culture de l’entreprise. Il a fallu de la confiance réciproque. J’arrivais avec ma culture, ma façon d’être, il fallait donc que je me sente capable de fonctionner dans ce milieu. Pour les dirigeants, il y avait aussi une prise de risques, une confiance dans ma capacité à m’adapter et à leur apporter des idées, des suggestions ou un regard qui puisse les aider. Et c’est ce qui a fonctionné. Mais très clairement, si à chaque fois qu’on m’a proposé un poste on m’avait expliqué dans le détail ce que c’était, j’aurais dit non ! Ça se jouait toujours sur une confiance mutuelle et une envie de travailler ensemble.TMI : Quel est, dans le domaine de la confiance, le défi le plus important que vous ayez eu à affronter ?
L.H. : Quand je suis arrivée dans le nucléaire, j’étais la seule à avoir ce profil littéraire dans une équipe de direction au niveau national. J’ai dû me légitimer dans ce milieu, avec cette équipe d’hommes et avec, à l’époque, des comportements dont on peut dire qu’ils étaient de l’ordre du bizutage. Cela, je m’en souviendrai longtemps, ça m’a vraiment frappée. Mais une fois que j’ai pu démontrer mes compétences, tisser des liens, me faire accepter, la confiance s’est instaurée, ça a très bien fonctionné. Le second challenge, ça a été en tant que dirigeant, lorsque je suis entrée dans le secteur du gaz. Il m’a fallu travailler sur la gestion du risque industriel et retisser, rétablir toute la relation de confiance à l’intérieur des équipes d’exploitants, pour sortir d’une longue période qui avait été basée sur la productivité au détriment de la politique industrielle et de tout ce qui concernait la sécurité. J’ai dû montrer que je m’engageais avec eux pour rebâtir les fondamentaux de leur métier, redonner la priorité à la sécurité, au renouvellement des compétences, etc. Donc il y avait des gages à donner pour qu’ils me croient et qu’ils acceptent de partir avec moi dans cette démarche de sécurité. Il s’agissait de sortir d’une période où ils n’avaient plus du tout confiance dans l’entreprise.
TMI : Comment analysez-vous le déficit de confiance au sein de la société française ?
« On a l’impression que nos gouvernants sont les premiers à adopter des lois qu’ils ne respectent pas. »
L.H. : Il existe une perte de confiance dans la capacité de notre pays à suivre un cap, à avoir une vision de ce que cette société veut être. Une société industrielle ? Dans ce cas nous avons un passé qui pourrait être une base solide. Est-ce qu’on est d’accord pour redonner ses lettres de noblesse aux écoles de formation d’ingénieurs, par exemple ? Aujourd’hui, on a l’impression d’un manque de confiance, d’un manque de points de repères, de prises de décisions. Les lois s’accumulent et s’empilent les unes sur les autres sans pour autant donner l’impression qu’elles répondent à un objectif précis et clair. Il existe un déficit de confiance vis-à-vis des gouvernements et des milieux politiques mais aussi une perte de confiance dans les valeurs fondatrices de ce pays. Celles-ci, aujourd’hui, sont parfois méconnues des jeunes. Il n’y a plus de lieux dans lesquels l’éducation civique se fait, où on reparle de toutes ces valeurs. Enfin, on a l’impression que nos gouvernants sont les premiers à adopter des lois qu’ils ne respectent pas. Finalement, je pense qu’il est assez difficile aujourd’hui d’avoir l’énergie de se battre pour sortir de cette situation.TMI : Au-delà des politiques, d’autres instances sont-elles visées ? Syndicats, grandes entreprises, grands patrons…
« Il n’y a pas que les patrons du CAC 40, il y a aussi
tous les chefs d’entreprise
qui font l’activité française
et qui créent de l’emploi. »
L.H. : Effectivement, on assiste à l’érosion complète des syndicats, de leur représentativité. Ce n’est pas une bonne chose. Le secteur industriel, celui des entreprises, est mal aimé des Français, avec effectivement une focalisation autour des patrons du CAC 40 et c’est fortement injuste. Il y a certainement eu des écarts et des situations tout à fait anormales. Mais dans mon rôle au Conseil économique et social, je m’attache à redonner une image positive des chefs d’entreprise : il n’y a pas que les patrons du CAC 40, il y a aussi tous les chefs d’entreprise qui font l’activité française et qui créent de l’emploi, qui n’ont pas le temps d’occuper la une des journaux, qui sont des gens de valeur et de qualité et qui sont, d’une certaine façon, tous malmenés, avec des discours, parfois même venant des politiques, qui les montrent du doigt comme étant des voleurs ou des profiteurs. Et ça c’est très nuisible. De même que cet axe qui consiste à dresser les uns contre les autres, les patrons contre les salariés, les pauvres contre les riches, les étrangers contre les Français, dans une situation de faiblesse comme celle dans laquelle on est aujourd’hui… tous les chefs d’entreprise
qui font l’activité française
et qui créent de l’emploi. »
C’est facile d’expliquer que tout cela c’est à cause de l’autre, mais c’est aussi ce qui ne permettra en aucun cas de s’en sortir.
Parce que je crois qu’on ne s’en sortira qu’en instaurant la coopération et la transversalité - que ce soit au sein d’une entreprise ou bien dans le pays -, en suscitant la mobilisation sur des objets positifs, pour créer de la valeur, de l’emploi, pour redonner de la confiance, plutôt qu’en séparant et en montant les uns contre les autres.
TMI : Que pourriez-vous suggérer au président de la République ?
« Proposer des axes de mobilisation positifs et non pas fondés sur l’exclusion. »
L.H. : D’abord de parler vrai. De dire la réalité des choses. Il est insupportable aujourd’hui pour beaucoup, d’avoir l’impression que sur certains sujets forts, ce sont des motifs tenant plus de l’ordre électoral ou partisan qui vont orienter une expression, plutôt que la volonté réelle de parler vrai et de dire ce qu’on attend de la décision ou de l’orientation proposée pour résoudre le problème identifié. Je crois que c’est insupportable. Cela crée une animosité et un rejet de tout le monde. Et on voit bien aujourd’hui, avec des millions de Français qui sont en difficulté de vie, qu’il est plus facile de s’accrocher à des discours simplistes et extrémistes. Il faut donc parler vrai et proposer des axes de mobilisation positifs et non pas fondés sur l’exclusion.TMI : Une crainte, un espoir pour l’avenir ?
« Je pense qu’on a une jeunesse qui peut être motrice et qu’il faut lui faire confiance. »
L.H. : Je suis fondamentalement positive dans mon esprit. Je me dis qu’à toute situation de crise il existe une issue positive qui est aussi une forme de renaissance. Parce qu’il y a de toute façon, dans notre mode de fonctionnement, des choses qu’il faut abandonner. Alors faut-il pour cela passer par des crises majeures ? Malheureusement, souvent oui. Ce sont des processus de transformation qui parfois fonctionnent. Mais il faut la volonté de se remettre en question, d’identifier les dysfonctionnements et de changer. J’espère qu’on va arriver à s’engager dans un processus de ce genre en France. Je pense qu’on a une jeunesse qui peut être motrice et qu’il faut lui faire confiance. Mais il faut abandonner toutes ces scories du passé, cette bilatéralité, cette bipolarisation permanente, cette opposition droite-gauche qui empêche de construire. Quand on est dans une situation qu’on peut caractériser comme particulièrement préoccupante, l’objectif n’est plus de se battre entre deux partis mais de se battre pour sortir le pays de cette situation. Et de lui redéfinir un projet social, industriel et économique qui puisse faire rêver. Aujourd’hui, on ne fait pas rêver. Mon expérience, c’est vraiment que lorsqu’on est dans un collectif, que l’on redonne de la vision, qu’on a un projet, qu’on donne des valeurs, qu’on montre qu’on peut les respecter, qu’elles peuvent donner du plaisir voire de la joie, eh bien même dans les situations difficiles- et j’en ai connu des cas d’accidents graves - ça soude un collectif et ça lui donne l’énergie pour repartir, reconstruire sur de nouvelles bases. Je pense profondément que c’est possible..TMI : Qu’est-ce qui vous a poussée à rejoindre TMI ?
L.H. : D’abord, la possibilité de travailler sur ces sujets de la confiance, de l’attitude des managers, des dirigeants. Nous venons de milieux différents, nous avons des responsabilités différentes, et donc travailler sur ce sujet-là me passionne. Il n’y a pas beaucoup d’endroits où on peut le faire. Parce que moi qui suis considérée comme ayant une formation issue des « sciences molles », par opposition aux « sciences dures », je trouve que l’énergie d’un pays ou d’un groupe humain vient justement de ces complémentarités et justement, de cette prise de conscience que l’humain est le moteur principal. J’entendais récemment parler du développement de plateformes virtuelles pour les étudiants. Les facs ne seront plus ce qu’elles étaient, très bien. Mais personne ne parle de l’importance du creuset social que constitue une faculté. D’un côté une formidable possibilité offerte par les nouvelles technologies, de l’autre cette question : comment l’utiliser pour donner du sens à l’humain et à la relation entre les humains ? Pour moi, TMI c’est cette possibilité-là.
TMI : Comment comptez-vous articuler votre activité à TMI et votre action au Club des Idées ?
L.H. : Je ne sais pas encore comment le Club des Idées va évoluer. Nous sommes à un moment charnière. Mon intention, et je vais en parler prochainement avec mes collègues, ce serait de susciter l’éclosion et la mise en place de Clubs des Idées pilotés par des jeunes. D’autre part, nous allons voir comment on peut créer et développer, comme cela se fait de plus en plus, un réseau virtuel qui relierait le Club des Idées, TMI et d’autres acteurs. Nous avons déjà mis en place un blog : ledésirdepenser.com… Ce n’est qu’une première étape !
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